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AD2M - PARECAM

Le rôle et l’importance des associations d’usagers des eaux de Migodo I, sur la côte ouest malgache

lundi 15 octobre 2012

Le renforcement et la formation d’associations d’usagers de l’eau est cruciale pour assurer une gestion durable des ressources hydriques. L’association des usagers de l’eau de Migodo I est un exemple d’une association existante dont les membres, trop nombreux et trop dispersés, ont grandement bénéficié d’une profonde restructuration et de conseils experts en gestion.


L’eau joue un rôle crucial dans le développement économique et social d’un pays. En effet, le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) souligne que « l’eau est étroitement liée à la santé, l’agriculture, l’énergie et la biodiversité. Sans progrès dans le domaine de l’eau, il sera difficile voire impossible d’atteindre les autres objectifs du millénaire pour le développement ».

En 2005, le document « Vision Madagascar, naturellement » considère l’agriculture comme un secteur prioritaire dans le processus de développement dont il faut tenir compte dans les objectifs économiques, sociaux et politiques. Ainsi dans le domaine de l’eau, une attention particulière a été portée sur l’amélioration et la construction d’ouvrages hydrauliques adaptés à l’agriculture, ainsi que par l’élaboration d’une politique nationale de gestion de l’eau agricole.

Sur la côte ouest malgache, depuis 2006, le projet d’appui au développement du Menabe et du Melaky (AD2M) intervient dans la gestion et la construction d’ouvrages hydrauliques dans les zones d’intervention du projet. Ce projet est financé en partie par le gouvernement malgache et l’Union Européenne via le programme d’appui à la résilience aux crises alimentaires de Madagascar (PARECAM).

Un des objectifs spécifiques du PARECAM est de favoriser une augmentation significative de la production agricole dans la zone d’intervention d’AD2M en assurant une vulgarisation des techniques agricoles à un nombre croissant de producteurs agricoles. Pour atteindre cet objectif, en 2009, le projet a procédé à réhabilitation du barrage et du canal principal de Migodo I (6 800 km de long), l’aménagement de périmètres rizicoles, ainsi qu’à l’étude et au contrôle des travaux d’ouvrages hydrauliques, des travaux de réhabilitation de périmètres irrigués, et à l’appui à la gestion et à l’entretien des périmètres.

Les ouvrages hydroagricoles (barrages, canaux principaux) de Migodo I et II ont été construits pour la première fois en 1956. L’État s’est occupé de la gestion des réseaux hydrauliques jusqu’à la formation de l’association des agriculteurs dans le périmètre d’Ankilizato (ASAPA) en 1997.

En effet, avant le mouvement de décentralisation à Madagascar en 1985, la gestion des grands périmètres était assurée par des sociétés d’État et celle des petits périmètres par les services du génie rural. Actuellement, l’entretien, la gestion et le contrôle sont passés aux mains des bénéficiaires constitués en AUE. Ainsi, le but premier des AUE, structures paysannes locales, est de maintenir en bon état de fonctionnement les infrastructures hydroagricoles.

C’est en 2010, suite aux travaux de réhabilitation du réseau, que le projet AD2M intervient dans la restructuration de l’ASAPA face à la mauvaise gestion et au mauvais fonctionnement de celle-ci. En effet, aucune cotisation n’est payée par les usagers, aucun plan de travail annuel (PTA) n’est planifié et le réseau est mal entretenu. L’ASAPA est divisée en deux associations : Migodo I et Migodo II. En Mars 2012, face au trop grand nombre de membre de l’association (environ 700 personnes) de Migodo I, celle-ci devient une Union composée de huit associations d’usagers des eaux (AUE) de base.

Cette restructuration a permis de prendre en compte la valeur des liens sociaux par le rapprochement des usagers les plus proches, de tenir compte de l’importance de l’intérêt commun en groupant les usagers des mêmes prises ou des prises les plus proches, de faciliter la circulation des informations entre membres d’AUE, de gagner la confiance des membres par la création d’une AUE autonome plus proche, sur laquelle peuvent s’exercer un contrôle.

L’Union, ainsi que les huit AUE, sont localisées dans la commune rurale Ankilizato, dans le district de Mahabo et regroupe huit villages. L’Union s’occupe des infrastructures primaires communes aux huit AUE dont le canal principal, le désableur, et surtout le barrage pour participer à la gestion, à l’entretien et à la protection. Les AUE s’occupent des infrastructures secondaires propres à une ou plusieurs AUE : canal secondaire, tertiaire, etc. 
 L’Union et les AUE comprennent chacune un bureau composé d’un président, un vice-président, un secrétaire, un trésorier et cinq commissions : eaux et travaux, finance, réglementation, production et développement. Une assemblée générale ordinaire permet la réunion de 80 membres (10 membres représentatifs par AUE) pour la prise des décisions concernant toutes les activités des associations, les questions financières, etc.

Les AUE ont également été créées afin de prendre en charge la gestion des périmètres irrigués de rizière dans le but de contribuer à l’augmentation de la production du riz, après le désengagement de l’État de la gestion, de l’entretien et du contrôle des réseaux hydroagricoles.

Grâce au bon fonctionnement du réseau et donc à une bonne maîtrise de l’eau, le projet a pu ensuite sensibiliser les AUE à la vulgarisation des techniques agricoles comme le système de riziculture intensif (SRI) et amélioré (SRA).

Ainsi, la restructuration du réseau a permis l’amélioration des périmètres rizicoles irrigués grâce à l’adoption de nouveaux systèmes de culture du riz pour lequel la maîtrise de l’eau est essentielle.

Monsieur Sosoka, un agriculteur qui utilise la technique SRI sur ces deux périmètres rizicoles irrigués, est très satisfait. Son rendement est passé d’environ 1,7 T/ha à 3,5 T/ha et l’eau ne manque plus. Actuellement, 45 % de la surface cultivée (soit environ 560 hectares) utilise les techniques SRI/SRA suite à la sensibilisation sur la vulgarisation des techniques agricoles par PARECAM. 

Lors des entretiens avec le président de l’Union de Migodo I, ainsi qu’avec certains membres des AUE, il ressort que la restructuration de l’Union de Migodo I et des huit AUE de base a été réussie. Monsieur Sosoka, usager de l’AUE n°5 et n°7 et deuxième adjoint au maire, est enthousiaste face au bon fonctionnement des nouvelles AUE. Selon lui, ce succès passe tout d’abord par le respect du règlement intérieur de l’AUE par les membres et la participation de chaque membre aux tâches d’entretien (une fois par jour par membre). De plus, les cotisations pour les frais d’entretiens du réseau ont été payées par la majorité des membres. Le montant est fixé à 5 000 ariary la première année et augmentera au fil des années (12 000 ariary) afin d’encourager les membres à entretenir leurs canaux.

Au niveau social, le travail des techniciens sur le terrain et l’encadrement des différentes phases de mise en place d’une AUE ont garanti que les droits et les besoins de chaque bénéficiaire soient pris en considération afin d’éviter des conflits futurs par rapport à l’eau. De plus, les membres interviewés ont conscience de l’importance d’une bonne gestion de l’eau et se sont engagés à apprendre à bien gérer l’eau. Au niveau technique, les infrastructures d’irrigation mises en œuvre sont adaptées au contexte local et sont faciles à gérer par des organisations d’usagers.

Au niveau local, les AUE nouvelles sont démocratiques et transparentes. Leurs membres sont motivés et ont bien pris en compte tout le bienfait d’une bonne gestion de la ressource tant sur le plan technique que sur le plan social.

Pour conclure, les quatre concepts clés pour établir une AUE reposent sur la motivation économique, sur la volonté d’améliorer le système de la gestion existante, sur la capacité de gestion locale et d’orientation collective, et, enfin, sur la possibilité de réalisation financière et technique.

L’Union de Migodo I et les huit AUE ont désormais pour perspective pour cette année 2012 de distribuer de façon équitable l’eau du réseau dans le but que la commune soit autonome dans la gestion de ses réseaux hydrauliques lors du départ du projet AD2M en 2014.

Pour plus de détails, voir l’étude complète ci-après.