PPRR
mardi 16 décembre 2008
L’élevage porcin dans la région d’Analanjirofo, dans le nord-est de Madagascar, est une activité à fort potentiel, le porc étant un animal dont les cycles de production et d’engraissement sont relativement courts. Le Programme de promotion des revenus ruraux (PPRR), un programme de développement rural financé par le Fonds international de développement agricole (FIDA), finance des microprojets destinés à moderniser les techniques d’élevage porcin des éleveurs pauvres de la région, pour leur permettre d’accéder au marché de Tamatave. La porciculture permet en effet d’assurer de meilleurs revenus aux producteurs dans des délais courts et répondre ainsi à leurs besoins. Mais la peste porcine africaine menace de réduire ces efforts en fumée.
La porciculture a été développée dans la région d’Analanjirofo, province de Tamatave
La « race métisse » est la plus répandue
La filière porcine à Madagascar est positionnée au deuxième rang en valeur et au troisième rang en nombre par rapport aux autres types d’élevage : bovin, caprin, ovin et avicole. Les régions productrices sont Antananarivo, Bongolava et les régions du lac Alaotra et Boina. Ces deux dernières sont des centres historiques de production porcine, mais l’élevage porcin est en réalité répandu un peu partout sur l’île et constitue une source de revenue non négligeable pour de nombreux ménages. La Province de Toamasina (ou Tamatave), et en particulier la région d’Analanjirofo où se concentrent les activités d’appui à l’élevage porcin du Programme de promotion des revenus ruraux (PPRR), regroupe seulement 2,1% du cheptel porcin de Madagascar. C’est un élevage encore traditionnel avec peu de technique et qui est sans cesse frappé par la peste porcine.
Le marché de Tamatave offre des débouchés importants pour les éleveurs de la région d’Analanjirofo. Cependant, l’élevage porcin de la région est extensif et sa faible productivité ne parvient pas à satisfaire les besoins du marché. En outre, la clientèle de la ville de Tamatave est exigeante, préférant la viande de porc de race améliorée. À cause du coût de la viande de porc (20 % plus chère que la viande de bœuf à Tamatave), elle n’est accessible qu’aux classes aisée et moyenne. En résultat, bien que la ville de Tamatave consomme plus de 40 porcs par jours (tous les animaux ne passent pas par l’abattoir), 5% seulement provient de la région d’Analanjirofo.
Pour remédier à la situation et permettre aux éleveurs locaux de vendre davantage de porcs sur le marché de Tamatave, le PPRR a mis sur pieds des microprojets de porciculture, en particulier destinés à l’engraissement des bêtes. Au total, dix organisations paysannes ont été financées dans la localité d’Iazafo pour développer chacune un de ces microprojets.
Les principaux obstacles : technique, finance et santé
Les principaux obstacles à une hausse de la production dans la région sont les techniques d’élevage, le manque de moyens financiers des éleveurs et la maladie. Dans la région d’Analanjirofo, la race porcine locale est en voie de disparition. Celle qui domine aujourd’hui est la « race métisse », résultat de croisements entre la race locale et les races importées Landrace et Large White. Les races améliorées sont présentes sur le territoire depuis plusieurs décennies et leurs caractéristiques sont souvent inconnues et difficile à déterminer : elles diffèrent d’un animal à un autre car les degrés de croisement entre les différences races ne sont plus maîtrisés. Par ailleurs, le prêt d’un verrat d’un élevage voisin pour aller saillir une truie est une pratique connue et acceptée, et favorise la consanguinité. Moins de 40 % des élevages ont des animaux reproducteurs, la majorité se consacrant essentiellement à l’engraissement. La durée de l’engraissement peut varier de 4 à 12 mois et est fonction de l’âge de l’animal et de la conduite de l’élevage, soit l’habitat, la claustration, la ration alimentaire et les soins.
Un élevage traditionnel et familial
La ration alimentaire est en général composé de son de riz en majeure partie, de son de blé, de restes de cuisine et parfois de poudre d’os. Certains éleveurs complètent cette ration avec des bananes vertes cuites, des fruits comme les jacques et du fourrage. Les exploitations qui cultivent des produits vivriers autres que le riz comme le manioc ou le maïs en conservent une partie pour l’alimentation des animaux. Les mangeoires et les abreuvoirs sont communs et sont en bambou. Il en est de même pour l’enclos et la clôture. L’inconvénient est l’entretien permanent que cela nécessite car les animaux, à cause de leur poids et du développement de leurs groins, arrivent facilement à les abîmer.
La main d’œuvre est familiale, rarement salariée, et les coûts de l’alimentation sont élevés pour les ménages ruraux pauvres.
La peste porcine africaine, une maladie dévastatrice
Les soins de santé des animaux constituent un obstacle majeur dans la plupart des élevages. Les maladies habituellement rencontrés sont la gale, la diarrhée et, surtout, la peste porcine africaine (PPA). Selon la Maison du petit élevage, cette pathologie a été introduite dans l’île en 1996 ou 1997, sans doute à cause du débarquement d’eaux grasses par des navires dans le sud du pays. Elle est entretenue par les pratiques d’élevage extensif, par certaines méthodes comme la divagation des porcs ou la nourriture à base de déchets de cuisine, et sans doute par l’existence d’un cycle sauvage sur des potamochères. Si le premier réseau de surveillance épidémiologique et une section de diagnostic de l’institut Pasteur de Madagascar n’ont été instaurés qu’en 1999, c’est que la PPA a longtemps été confondue avec la peste porcine classique.
Le pic de l’épidémie de la PPA à Madagascar se situe entre septembre 1998 et mars 1999. Depuis, on ne relève des pics sporadiques que dans de nouveaux élevages ou dans des élevages ayant déjà été infectés. La maladie, pour laquelle il n’existe pas de vaccin, est à présent considérée comme enzootique sur quasiment tout le territoire.
La maladie se déclenche surtout en période de chaleur, entre septembre et décembre, malheureusement, la grande majorité des éleveurs de la région ne sont pas formés, organisés entre eux ou encadrés, et ils ne prennent pas les dispositions qui s’imposent. Les revenus faibles des ménages d’éleveurs ne leur permettent par ailleurs pas d’investir dans les soins de santé et la prophylaxie. Parmi les élevages appuyés par le PPRR, 80% se limitent au traitement des parasites internes et externes avec des médicaments polyvalents tels que l’Ivomec. Le vétérinaire n’est sollicité qu’en cas d’incapacité des éleveurs, mais dans la plupart des cas les éleveurs laissent plutôt mourir les animaux car ils n’ont pas les moyens de payer les soins.
Accent sur la formation
Dans le cadre de l’appui du PPRR, les éleveurs ont reçu une formation en porciculture et bénéficient d’un suivi par des conseillers agricoles, au moins durant le premier cycle des activités. Au total, 70 éleveurs ont participé aux projets, dont 44% de femmes. La contribution des participants aux coûts s’élevait à 23% du budget.
Les résultats obtenus sont dans l’ensemble positifs car deux organisations paysannes sont à leur troisième cycle d’engraissement et le nombre d’animaux prévus à ce stade par le projet ont été quasiment déjà triplés dans 20% des microprojets. Par ailleurs, certains membres essaient de diversifier en introduisant des animaux reproducteurs. Même si les difficultés dues à la commercialisation et au passage de la PPA persistent, les éleveurs ont, pour la première fois, été encadrés dans la région.
Cependant, la PPA reste encore un handicap pour le développement de l’élevage porcin dans la région d’Analanjirofo. Les éleveurs soutenus par le PPRR accordent plus d’importance à l’hygiène de leur élevage, mais ces efforts restent insuffisants.
En effet, les pertes dues à la PPA ont des conséquences extrêmement importantes tant du point de vue financier que pour l’élevage, causant mortalité, abattage sanitaire et arrêt des activités. On estime qu’entre 1997 et 1999, 50% du cheptel porcin a été décimé, ce qui représente une perte de plus de 21 millions d’euros par an. De plus, le prix de la viande à l’étalage a été multiplié par deux, la viande de porc étant devenue un produit de luxe pour de nombreux Malgaches, alors que le prix de vente chute (en 2008, il a diminué de 37,5%). Ainsi, les éleveurs liquident leurs porcs ou préfèrent attendre la fin de l’épidémie, ce qui occasionne des dépenses additionnelles en alimentation et le risque de perdre des animaux par contamination.
Enfin, le programme n’a pas encore su améliorer les conditions de commercialisation à cause de la faiblesse du volume de production.
Marlène Capo-Chichi - octobre 2008
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