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La modernisation de la filière miel à Madagascar, le cas de M. Kosy

mercredi 30 décembre 2009

M. Kosy, apiculteur artisanal de la région de Fenerive Est, ne tirait qu’un revenu minime de sa production. Avec l’appui technique et financier du Programme de Promotion des Revenus Ruraux (PPRR), il a aujourd’hui une source de revenu complémentaire et échelonnée tout au long de l’année.


M. Philémon Kosy, agriculteur Betsimisaraka, habite dans le village de Rantolava, Ampasina Maningory, à Fenerive Est. Il possède une petite exploitation d’environ 0,33 ha et utilise cette surface pour faire pousser du manioc, du riz, de la banane, du maïs, de la patate douce et parfois des produits maraîchers. Il élève également des volailles.

Une activité principalement artisanale

L’exploitation du miel a toujours été, pour Philémon Kosy, une activité complémentaire qui s’ajoute aux activités agricoles traditionnelles. Il a hérité l’apiculture de son père : « Dans cette région, explique-t-il, la plupart des paysans qui font de l’apiculture l’ont héritée de leurs ancêtres ». Cette activité, pratiquée à l’échelle artisanale, suffisait tout juste pour l’autoconsommation et, pour ceux qui vivaient à proximité des marchés, une petite partie de la production était destinée à la vente.

M. Kosy pratiquait l’apiculture artisanale lorsque le Programme de Promotion des Revenus Ruraux (PPRR), un projet du Gouvernement de Madagascar financé par le Fonds international de développement agricole (FIDA), s’est implanté dans la région. « J’avais deux colonies et mes ruches étaient simples », raconte M. Kosy. Il n’investissait que peu dans cette activité et amenait lui-même le miel aux marchés environnants, ou vendait eu gros aux épiceries et aux collecteurs ambulants. Le prix moyen qu’il en retirait ne dépassait pas 1 400 Ar (US¢15) par litre.

Les deux contraintes majeures auxquelles faisait face M. Kosy étaient le manque de préparation technique et le faible degré d’investissement. Les matériels apicoles étaient trop chers pour M. Kosy. Il manquait, par ailleurs, des connaissances techniques nécessaires pour gérer une exploitation de miel moderne et tirait ses connaissances uniquement de l’enseignement de son père. La qualité et la quantité du miel ressentait de ces limites : « La plupart du temps, je faisais trop tôt la récolte du miel, et cela n’est pas bon pour le produit car, à ce stade, il contient beaucoup d’eau et ça rend difficile sa conservation », explique M. Kosy. Enfin, les ruches, mal entretenues, ont été attaquées par des parasites et les techniques de récolte utilisées perturbaient les colonies. Celles-ci perdaient du temps à reconstituer les plaques une fois la récolte passée et les reines pouvaient parfois être tuées lors des manipulations.

Le manque de débouchés représentait une troisième contrainte. La faible qualité du produit, la vente de gros et la quantification, parfois inexacte, de la production, affectait le prix de vente et le rendait peu attrayant.

Un appui ciblé sur la technique et les débouchés

Suite à une réunion organisée par les techniciens du PPRR dans la commune pendant laquelle ils ont expliqué les buts généraux et les activités à démarrer, M. Kosy a immédiatement déposé une demande d’appui pour sa production de miel.

Le programme a structuré son appui par étapes. Tout d’abord, il a aidé les apiculteurs à se regrouper pour créer, en 2005, l’association paysanne de l’apiculture. Composée de dix membres, dont M. Kosy, elle regroupe essentiellement des apiculteurs autodidactes.

Les techniciens du PPRR se sont ensuite rendus à l’exploitation pour, d’abord, définir et organiser toutes les activités et les formations à mettre en place, ainsi que pour sélectionner les parcelles qui hébergeront les nouvelles ruches. Les formations se sont principalement focalisées sur les soins du produit après récolte, de façon à améliorer la qualité du produit. Les apiculteurs ont ainsi appris à extraire le miel par centrifugation, à le filtrer puis le stocker dans des seaux en plastique alimentaire, pour le conserver dans de bonnes conditions d’humidité et de température.

Le programme a également prévu un soutien financier pour l’achat de combinaisons de protection et du matériel nécessaire tel que ruches, enfumoirs et lève-cadres. Les techniciens ont également appris aux apiculteurs à manipuler les nouvelles ruches, plus faciles à entretenir et efficaces lors de la récolte, et les ont aidé à peupler les ruches et à gérer le calendrier de production.

Un calendrier de visites techniques a ensuite été mis en place, par l’intermédiaire d’un organisme d’appui, pour dispenses les formations relatives à la manipulation du produit après récolte et à la recherche de débouchés. Le centre d’accès au marché (CAM) de Maningory est devenu la plaque tournante du commerce du miel : en effet, toute la production de M. Kosy est désormais commercialisée par le CAM, ce qui lui a permis d’augmenter ses recettes et de contourner les intermédiaires. Ses acheteurs directs se trouvent maintenant dans la métropole la plus proche, Tamatave.

Vers l’autonomie

Bien que le cycle formel de formation soit terminé, l’équipe du PPRR et l’organisme d’appui continuent d’appuyer ponctuellement les apiculteurs. Ce soutien cherche à renforcer leurs capacités pour gérer la production du miel de façon autonome dans le futur ainsi qu’à améliorer et renforcer leurs connaissances et relations avec les marchés.

L’appui du PPRR a visiblement porté ses fruits dans le cas de M. Kosy. Au niveau technique, celui-ci a nettement amélioré ses connaissances et sa façon de travailler avec les abeilles. Le programme l’a aidé à évoluer d’une apiculture traditionnelle et peu rentable vers une autre, plus moderne. Il possède aujourd’hui 12 ruches à cadre, contre deux auparavant, et sait les entretenir et prendre soin de ses abeilles.

De plus, les formations ayant trait à la qualité du produit ont eu un effet positif. Avec l’augmentation de la qualité de sa production et du travail fourni pour mettre en valeur le produit, de nouvelles possibilités de marché sont apparues. Grâce au travail du CAM Maningory, qui a créé un rapport commercial plus direct entre l’apiculteur et les acheteurs de Tamatave, M. Kosy peut dorénavant éviter plusieurs intermédiaires et augmenter ainsi son revenu agricole.

L’apiculture traditionnelle

L’apiculteur attrape un essaim sauvage dans la nature et le place dans une caisse, une bombarde en terre cuite ou un tronc d’arbre évidé. À partir quelques croisillons installés auparavant, les colonies construisent les rayons de cire en les associant et les liant les uns aux autres. Pour la récolte, l’apiculteur doit alors détruire complètement les gâteaux de cire et tuer la colonie, par asphyxie ou par le feu, pour récupérer les rayons. Le miel ainsi obtenu n’est pas de très bonne qualité.

Source : http://madabeilles.fr/index.html

Deux éléments sont à signaler par rapport au revenu perçu par l’apiculteur en 2008. Tout d’abord, le prix proposé par le CAM est supérieur à celui qu’il recevait auparavant (4 000 Ar, US¢44, contre 1 400 Ar, US¢15, le kilo). Cela s’explique en partie par le fait qu’il vendait un miel de moindre qualité et dans des bouteilles de plastiques, dont la mesure était variable. Par ailleurs, un litre tel que défini en zone rurale contient entre 1,75 et 2 kg. En résultat, les collecteurs ou épiciers payaient à l’apiculteur entre 17,5% et 20% seulement du prix pratiqué en 2008 par le CAM. Au-delà de l’augmentation du prix, il est aussi important de noter que la production a augmenté, permettant ainsi à l’apiculteur d’avoir une source de revenu complémentaire et échelonnée tout au long de l’année.

Jairo Paizano, juillet 2009