PROJET POUR LA PROMOTION
DES PETITES ET MICRO-ENTREPRISES RURALES

Le livre

Un impact exceptionnel mais un marché anémique

D'après les études d'évaluation, les revenus des bonnes pmer soutenues par le projet auraient doublé. L’impact du PPPMER est donc globalement positif : de petites unités de transformation ont émergé en milieu rural, la qualité des équipements et de la production s’est améliorée, les chiffres d’affaires ont augmenté ainsi que la clientèle, les fixations des prix (prix de revient et prix de vente) sont devenues plus rationnelles. Même les pmer des districts qui n’ont pas été touchés par le projet ont été sensibilisées à la nécessité de se moderniser et de progresser !

Pour illustrer l'impact du projet, nous donnerons la fréquence d'écoute de l'émission de radio qui lui est consacrée, 97% ! C'est un signe de l’intérêt des pmer qui apprécient aussi la radio pour la promotion de leurs produits.

Les points forts du projet seraient selon l’étude d’impact :

  • l’amélioration des conditions de vie de la population et leur sortie du cercle infernal de la pauvreté,
  • l’apprentissage des métiers pour les jeunes,
  • des revenus supplémentaires pour les pmer formatrices (PP),
  • l’augmentation de l’emploi,
  • l’amélioration du niveau de connaissances en gestion,
  • le développement de l’esprit d’entreprise,
  • l’augmentation de la qualité des produits,
  • le rôle social accru des entrepreneurs,
  • l’émergence de personnes ressources comme les CE ,
  • la participation aux appels d’offre régionaux,
  • la sensibilisation à l’importance des organisations professionnelles,
  • le rapprochement du système bancaire,
  • la promotion de l’épargne,
  • la contribution à la réconciliation nationale (voyages, échanges, caution solidaire, etc.).

Les points faibles du projet seraient :

  • la faible durée et l’insuffisance des formations (technique et gestion),
  • le manque de voyages d’études,
  • la faible diversification des métiers,
  • la faible exploitation des potentialités régionales,
  • la longueur des procédures d’octroi et le montant insuffisant des crédits,
  • l’absence de leasing pour les équipements,
  • le manque de fonds de démarrage et d’appui pour les apprentis lauréats,
  • la faiblesse du marché.

1 Impact de la formation sur le dynamisme des bénéficiaires

Selon une mission récente de l’UNOPS , la plupart des objectifs physiques du projet ont été atteints et même dépassés avec une moyenne de 125% de réalisation à l’exception du crédit. Ces performances ont été atteintes grâce à la compétence et à la détermination de l'équipe du PPPMER en particulier dans le domaine de la formation qui représente 25% du coût du projet.

Coût du projet en DTS

Prévu

Réel

Total du Coût du Projet

4,157,694

3,922,848

Total du Coût de la Formation

1,018,822

981,498

% par rapport au coût prévu du projet

24.5%

% par rapport au coût réel du projet

25%

a) Alphabétisation et apprentissage

L'Alphabétisation fonctionnelle a permis de toucher plus de 6700 adultes alors que 2000 seulement étaient prévus. Quant aux 2064 lauréats des 6 premières promotions d'apprentissage, 26% sont en quête d'emplois et régulièrement suivis par le projet, 34% ont créé leurs pmer, 31% sont employés dans les entreprises où ils ont reçu la formation.

b) Organisation

155 groupements d’artisans du PPPMER se sont organisés dans 18 filières de métiers au niveau des secteurs (communes). Le dynamisme et la motivation des différentes organisations professionnelles (Filières, Corps de métiers, Fédérations) est remarquable pour des OP de création récente. Les Fédérations et les Corps de métiers demandent des bureaux et les plus dynamiques tentent de démarrer une activité rentable pour assurer leur pérennité.

c) Esprit d'entreprise et conseillers d'entreprise(CE)

Les Conseillers d'entreprise issus de ces organisations, bénéficiaires de cette formation, sont devenus des formateurs permanents, non seulement des membres de leurs associations et des autres pmer, mais aussi de la population environnante, en management et en préparation de projets. Le niveau d'estime que leur accorde la population leur a même permis d'accéder à des postes d'élus locaux.

d) Appui en formation

Le PPPMER s’est focalisé sur la professionnalisation et la dynamisation des différentes pmer à travers la formation en management, la formation technique et l’accès au crédit en particulier à travers les IMF.

2300 pmer on été consolidées, c'est-à-dire formées en gestion, et 1900 pmer formées en préparation des projets/gestion des crédits. La formation a été très appréciée pour le calcul des bénéfices ou la mise en place de différents cahiers :

  • 83% de pmer ont affirmé que leur CA a augmenté suite aux acquis de la formation et à l'accès au crédit,
  • 67% des pmer formées affirment que la qualité de leurs produits s'est nettement améliorée après la formation en technologie,
  • 56% auraient adapté leurs équipements à la suite de leur formation,
  • 76% ont aménagé leurs locaux pour augmenter leur productivité.

L’impact de la formation a été très important : par exemple, grâce à la formation, les apiculteurs ont acheté des ruches modernes (125.000 Frw la ruche) et ils ont doublé leur production. S’ils avaient pu acheter l’équipement complet, qui est trop cher pour eux selon leurs calculs (coût 185.000 Frw), leur production aurait triplé.

e) L’accès au crédit

Les activités de crédit ont démarré en mars 2000 avec 2 types de crédits :

  • Le crédit coup de pouce destiné aux pmer dites de survie ou émergentes. Ces type de crédits ont été octroyés en collaboration avec les IMF en vue de d'associer progressivement les pmer aux activités de micro finance.
  • Le crédit ordinaire octroyé à travers les Banques Populaires destiné aux pmer en croissance.

Dans le cadre du PPPMER, il n’y a pas d’accès au crédit sans formation préalable. Cette formation semble d’ailleurs indispensable car certaines pmer non soutenues par le projet ignorent qu’il faut rembourser le crédit… D'autre part, le regroupement des pmer en groupes de caution solidaire (GCS) leur a permis d'être fiables auprès des IMF, la caution mutuelle étant la seule garantie dont elles disposent. Presque tous les bénéficiaires des crédits coup de pouce sont d’ailleurs membres de ces GCS.

Plus de 40% des pmer (1633) ont bénéficié du crédit pour un montant global de 159 millions FRw. L'objectif a été atteint à 80% pour les crédits coup de pouce, et à 50% pour le crédit ordinaire (Banques Populaires).
Après utilisation du crédit coup de pouce, le capital de l'entreprise a augmenté pour 83% des pmer et le niveau d'épargne pour 76% d’entre elles. Ces proportions pour les crédits Banque Populaires sont de 91% pour le capital et 71% pour l'épargne.

2 Analyse financière

En moyenne, une pmer soutenue par le projet perçoit un revenu égal au double d’une pmer hors projet. C’est ce que confirment la plupart des enquêtes sur le terrain : les bénéfices ont partout augmenté et souvent doublé.

a) Chiffres d'affaires, fonds de roulement et équipement

Selon l’enquête de suivi-évaluation menée par le PPPMER entre 1998 et 2002, 78% des entreprises touchées par le projet ont augmenté leur fonds de roulement et leur chiffre d’affaires et 75% des pmer la valeur de leurs biens et équipements.

Structures des entreprises à Ruhengeri selon leur chiffre d’affaires en FRw

Total
Entreprises

Inférieur ou
égal 50000

50000 à
100000

100000 à
500000

Plus de
500000

5446

3082

1590

705

60

100%

57%

29%

13%

1%

Atelier de menuiserie (Humure)

La couche intermédiaire des entreprises émergentes, est devenue plus importante de même que celle des entreprises en croissance. La taille des pmer et leur capital (fonds de roulement plus équipement) ont augmenté au cours du projet, de nombreuses pmer issues des couches vulnérables changeant de catégorie et passant dans la catégorie supérieure.

Evolution des fonds de roulement

 

Catégorie

initial

après projet

Inférieur à 15000

25,11%

15,65%

entre 15 000 et 150 000

63,71%

67,14%

Plus de 150 000

11,19%

17,21%

Total

100,00%

100,00%

     

Evolution des équipements

 

Catégorie

initial

après projet

Inférieur à 15000

36,80%

27,04%

entre 15 000 et 150 000

55,92%

60,85%

Plus de 150 000

7,28%

12,12%

Total

100,00%

100,00%

b) Revenus

Les revenus ont augmenté, mais ils restent faibles. Comme exemple, nous prendrons Byumba qui illustre bien la situation moyenne des pmer soutenues par le projet.

Echelle de valeurs des revenus mensuels actuels des pmer à Byumba

Echelle de valeurs

1

2

3

4

5

6

7

De 0
à 4999

De 5000
à 9999

De 10000
à 49999

De 50 000
à 99999

De 100000
à 499999

De 500000
à 999999

1,000,000
et plus

La rémunération du travail n'est que de 300 à 500 FRw par jour avec des salaires mensuels de 7.000 à 12.000 FRw. Les ouvriers sont parfois payés à la tâche ou au pourcentage des ventes, jusqu’à 30% du prix de vente chez certains menuisiers. La majorité des revenus (56% - voir tableau précédent) évolue encore aujourd'hui dans la catégorie 3 : de 10.000 Frw à 50.000 Frw.

3 Impact sur les femmes

42% de femmes au lieu des 30% prévus ont été touchées par le projet. Par exemple, dans la province de Ruhengeri, les conseillers d’entreprise femmes sont 42%. Cependant, dans la même province, on observe que moins d’un quart des femmes bénéficient d’une formation en gestion, en esprit d’entreprise ou en technologie. De même, si 37% d’entre elles reçoivent des crédits « coup de pouce », seules 18% des femmes bénéficient des crédits ordinaires qui sont plus importants. En apprentissage, il y a eu 47% de femmes et, en alphabétisation fonctionnelle, elles représentent les deux tiers des bénéficiaires.

L’impact sur les femmes est majeur dans les pmer associatives où les femmes sont représentées à 48%. Ces pmer comptent en leur sein jusqu’à parfois plus de vingt (20) femmes. Les pmer individuelles féminines ne sont que 27%, dont beaucoup de femmes commerçantes, très nombreuses sur les marchés, qui appartiennent souvent à la cible des pmer les plus faibles.

Tresseuse de Ruhengeri

Beaucoup d’associations féminines (broderie, couture) ont des difficultés pour commercialiser leurs produits : certaines femmes gagnent, si l’on comptabilise leur temps de travail, environ 150 Frw par jour, soit la moitié du plus petit salaire journalier au Rwanda. Les résultats du projet sont donc contrastés, mais un effort indéniable a été fait dans un milieu dominé traditionnellement par des artisans masculins.

Cependant certaines femmes dirigent des pmer plus importantes. Le projet a initié, en collaboration avec le CAPMER (ONUDI), des formations spécifiques pour les femmes entrepreneurs dans la transformation des produits agricoles en jus, vins et confitures. Toutes ces femmes ont actuellement leurs unités de production et l'une d'entre elles a même été invitée à Rome au FIDA pour exposer sa technologie.

4 Un marché anémique

Le marché du secteur informel est, hélas, fort étroit. Deux aspects importants sont à noter:

  • la faiblesse du pouvoir d'achat de la population : le pouvoir d'achat de la population rwandaise est faible et son revenu, affecté, en priorité aux besoins de première nécessité ;
  • les habitudes de consommation : nombreux sont ceux qui préfèrent les produits importés aux produits locaux, même si ces derniers sont de qualité supérieure et moins chers.
a) Etat des lieux

Il y a plusieurs types de marché : le marché local, le marché provincial et le marché national. La plupart des pmer visent le marché local ou provincial, mais les plus grosses d’entre elles peuvent prétendre au marché national ou à celui de la capitale en concurrence avec de grandes entreprises. Par rapport aux marchés urbains permanents, les marchés villageois sont en effet atomisés, instables, enclavés et ils dépendent de paramètres non maîtrisables : une bonne récolte ou le cours d'une culture (thé, café…) fixé par une bourse étrangère.

Plantations de thé à Byumba

Le potentiel de croissance est variable selon les entreprises et les pmer les plus dynamiques visent le marché des villes rurales ou des gros bourgs. Ainsi, elles peuvent fonctionner toute l'année sur un marché qui comprend aussi bien des citadins (fonctionnaires) pour les produits de consommation courante que des paysans qui viennent effectuer leurs achats ou vendre leurs produits. La plupart des pmer dont l'investissement est supérieur à 1 million de FRw, sont d’ailleurs installées dans ces bourgs ou sur des axes routiers stratégiques.

b) Appui à la commercialisation

C’est grâce à l’amélioration de leurs produits, de leur technologie et, in fine, de leur compétitivité que les pmer peuvent trouver de nouveaux créneaux sur ce marché étroit. Il s’agit de concurrencer les produits urbains qui sont présents sur les marchés ruraux, de reconquérir le marché intérieur mais, aussi, de lutter contre la concurrence étrangère et, éventuellement, d’exporter vers la région des Grands Lacs et l’Afrique de l’Est.

Indépendamment de la formation, il faut aussi organiser les producteurs pour lutter contre la concurrence incontrôlée, fixer des prix de vente minimum comme cela a été réalisé dans la Province de Ruhengeri pour les fabricants de chaux ou de briques qui ont multiplié leurs revenus jusqu’à ce qu’ils soient touchés par une crise socio-écologique... Car, associées, les pmer peuvent:

· Gagner les marchés publics : les pmer organisées peuvent concourir à de grands marchés alors que, seules, elles ne peuvent pas exécuter les commandes.
· Commercialiser leurs produits en quantité suffisante : certaines pmer peuvent vendre leurs produits au niveau provincial, national voire à l’export.
· Acheter et partager de l'équipement pour diminuer les coûts d'acquisition : les artisans de l'association KORA ont acheté en commun des outils qu'ils partagent.
· S’approvisionner à des prix de gros en matières premières.

 

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